Written by 15h26 Culture, Portraits

STEPHAN VANFLETEREN MAÎTRE ANCIEN DE LA PHOTO CONTEMPORAINE

Depuis plus de trois décennies, Stephan Vanfleteren (°1969) capture la complexité de la vie à travers son objectif, jonglant entre la mer, la mort, la vie, et les contrastes entre bonheur et misère. Ses portraits, allant des pêcheurs de la mer du Nord au peuple de Charleroi, jusqu’aux figures emblématiques comme Stromae, Michael Haneke et Kevin De Bruyne, témoignent de son talent unique.

Aujourd’hui, le Hangar à Bruxelles célèbre son travail à travers une exposition monumentale, mettant en lumière son impact sur la photographie contemporaine.

Le lien de Vanfleteren avec la lumière remonte à son adolescence passée dans les dunes de la côte belge. Si, à 16 ou 17 ans, il envisageait une carrière en architecture, il a finalement choisi la photographie, attiré par la solitude créative et la flexibilité qu’elle offre. « J’ai vite compris que la photographie serait ma voie, » explique-t-il. Après des études à Sint-Lukas à Bruxelles, il commence sa carrière dans les rues de la capitale avant de se lancer dans le photojournalisme au journal De Morgen, collaborant également avec des publications comme Le Monde et Die Zeit.

Un Style Reconnu Internationalement

Six fois récompensé au prestigieux World Press Photo, Stephan Vanfleteren excelle dans l’art de capturer l’émotion brute. Ses images, empreintes d’une technique irréprochable et d’une empathie profonde, transcendent les scènes qu’elles représentent, lui valant une reconnaissance nationale et internationale.

Malgré les défis inhérents au photojournalisme – souvent dans des conditions inconfortables – Vanfleteren a toujours cherché à sortir de sa zone de confort pour explorer de nouveaux horizons. C’est cette quête constante de renouveau qui continue de définir sa carrière.

Après dix ans de carrière couronnée de succès au journal De Morgen, Stephan Vanfleteren a décidé de quitter un poste confortable pour embrasser l’inconnu et se réinventer. « J’ai souvent envie de recommencer, de plonger dans des thèmes inconnus avec une intensité nouvelle », explique-t-il. Cette passion dévorante l’a conduit à explorer des sujets aussi variés que Charleroi, les surfeurs ou encore le Mur de l’Atlantique, dans une démarche obsessionnelle presque maniaque.

Son dernier projet marque une nouvelle phase dans sa quête artistique : il promet de jouer avec la lumière, les couleurs, et leur interaction avec les surfaces, tout en redéfinissant son approche.


Le travail de Stephan Vanfleteren évoque souvent l’atmosphère des grands maîtres de la peinture classique et contemporaine, bien qu’il en soit totalement indépendant. Des parallèles peuvent être tracés avec :

  • José de Ribera (1591-1652), pour ses jeux de clair-obscur entre ténèbres et lumière.
  • Michaël Borremans (°1963), pour sa capacité à insuffler mystère et profondeur dans une réalité figurative.

D’autres noms comme Rembrandt, Caravaggio ou Zurbarán viennent aussi à l’esprit en observant ses photographies, bien que son art reste purement photographique, transcendant toute classification.


Deux Expositions Incontournables

  1. Atelier au Hangar à Bruxelles (jusqu’au 21 décembre 2024) : Cette exposition présente 12 ans de travail réalisé principalement dans la lumière naturelle de son atelier de Furnes. Dans cet espace de 60 m², tapissé de toiles grises et baigné par la lumière du sud, Vanfleteren a créé des œuvres captivantes, souvent en grand format. Les photographies exposées sont également réunies dans un livre éponyme publié par Hannibal Books.
  2. Pèèrdevisschers au Navigo à Oostduinkerke (jusqu’au 4 janvier 2025) : Une exploration poétique de l’univers des pêcheurs à cheval, mêlant tradition et modernité dans des clichés d’une intensité saisissante.

Une Reconnaissance à l’International

En même temps que Vanfleteren expose à Bruxelles et Oostduinkerke, les maîtres qui l’inspirent, comme Ribera et Borremans, font l’objet d’importantes expositions cet hiver. Ribera est présenté au Petit Palais à Paris (jusqu’au 23 février 2025), tandis que Borremans est visible au Musée Voorlinden à Wassenaar (jusqu’au 23 mars 2025).

Stephan Vanfleteren : L’Atelier, Une Ode à la Lumière et à l’Instant

Avec son exposition Atelier au Hangar à Bruxelles et le livre éponyme publié par Hannibal Books, Stephan Vanfleteren dévoile une nouvelle dimension de son art. Il ne se déplace plus à travers le monde pour ses photographies ; il invite le monde dans son atelier, où il compose des images d’une sobriété et d’une sophistication rares, éclairées par une lumière naturelle venant du sud. Cette lumière, changeante et imprévisible, devient un acteur essentiel de ses œuvres, offrant à chaque cliché une profondeur unique.


Travailler avec la Lumière : Entre Limitation et Liberté

Dans son atelier aux dimensions modestes, Vanfleteren s’arme de patience et d’observation, acceptant les caprices de la lumière naturelle. « Un ciel couvert, une pluie passagère, puis un rayon de soleil… Tout change en quelques minutes. Cela influence directement ce que je photographie. » Contrairement à la lumière artificielle, où le résultat est prévisible, cette méthode impose une collaboration avec les éléments. Parfois maudite, cette approche lui permet néanmoins de capturer l’imprévisible et de laisser place à l’émotion.


Un Fil Rouge à Travers les Genres

Depuis ses débuts dans le photojournalisme jusqu’à ses portraits et ses travaux introspectifs, le fil rouge du travail de Vanfleteren réside dans sa capacité à rendre chaque image pertinente, autant pour lui que pour son public. Avec Atelier, il pousse cette quête encore plus loin, prenant tout le temps nécessaire pour composer des clichés simples mais puissants, tels qu’une tache de lumière sur une toile grise ou une vague en mer. Ces images, loin d’être anodines, invitent à la contemplation et à la réflexion.


Une Méditation sur la Lumière et l’Émotion

L’œuvre de Vanfleteren est imprégnée de mélancolie et de gratitude envers la lumière. Elevé près de la mer, il a grandi en observant les contrastes saisissants entre les saisons : l’euphorie estivale et la solitude hivernale. Cette dualité alimente son travail, où la lumière devient une métaphore de la transformation et de l’émotion.

Comme le souligne l’écrivain Ilja Leonard Pfeijffer, ami de Vanfleteren, dans la préface du livre Atelier, « Ses photographies ne sont pas des rendus de la réalité figée, mais des sculptures de lumière, soigneusement composées, à l’image des grands maîtres anciens. »


Une Approche Éloignée des Instantanés

Contrairement aux clichés instantanés qui figent un moment, les photographies d’Atelier capturent la lumière comme un miroir des émotions et des idées. Ces compositions minutieuses rapprochent son travail de celui des peintres classiques, tout en le plaçant dans le contexte contemporain.

La Vieille Lumière et le Temps : Une Perspective Unique de Stephan Vanfleteren

Pour Stephan Vanfleteren, la lumière est bien plus qu’un simple élément technique : c’est une connexion au passé, une manière d’inscrire son art dans une continuité historique. « La lumière qui pénètre mon atelier aujourd’hui est vieille, fatiguée. Elle a voyagé plus de huit minutes depuis le soleil, » explique-t-il. Mais au-delà de cette explication littérale, il fait un parallèle avec les grands maîtres tels que Caravaggio, Ribera ou Rembrandt : « Cette même lumière a été perçue par ces artistes dans leurs ateliers il y a 300 ou 400 ans. Elle établit une connexion tangible entre leurs œuvres et les miennes, ce qui me procure une sensation très particulière. »

« JE NE ME COMPARE PAS DU TOUT À EUX, MAIS QUAND JE ME TROUVE DEVANT UN CARVAGGIO, UN RIBERA OU UN REMBRANDT, JE VOIS, JE RESSENS, JE RECONNAIS DANS LEURS TABLEAUX QUELQUE CHOSE
QUE JE VOIS AUSSI DANS MON
ATELIER EN PHOTOGRAPHIANT UN NU OU UN PORTRAIT. »

Une Dernière Image Chargée de Sens

Dans le livre Atelier, la dernière photographie représente une table recouverte d’une toile grise, projetant l’ombre d’une silhouette humaine, comme sur un catafalque. Cette image finale est empreinte de symbolisme, rappelant le lien entre la photographie et la mort. « La photographie capture un instant qui, au moment où l’image est prise, appartient déjà au passé. Elle est figée, sans projection dans l’avenir, » déclare Vanfleteren. Cette réflexion souligne le rôle de la photographie comme un témoignage intemporel, immortalisant ce qui n’est plus.


Une Exposition et un Livre pour Réfléchir sur le Temps et la Lumière

L’exposition Atelier, comme le livre qui l’accompagne, est une invitation à explorer des thèmes profonds : la lumière, le temps, et la mortalité. Chaque image, qu’il s’agisse d’un portrait, d’un nu ou d’une nature morte, est une méditation sur la fragilité et la permanence, deux notions intrinsèquement liées à la

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